Intermède (publicité)
Première tranche de vie : ouverture
Instrumentation
Première tranche de vie : Présentation
Présentation
Présentation
Présentation
Le naturalisme
Première tranche de vie
Première tranche de vie
Première tranche de vie
Première tranche de vie
Deuxième tranche de vie
Deuxième tranche de vie. Intermède
Deuxième tranche de vie. Le rond de saucisson de l'ouvrière honnête
Troisième tranche de vie
Troisième tranche de vie
Quatrième tranche de vie
Quatrième tranche de vie. Air : Monsieur J. Duplan
Quatrième tranche de vie. Air : Monsieur J. Duplan
Quatrième tranche de vie. Air : Monsieur J. Duplan (Lent)
Citation
Quatrième tranche de vie (Intermède)
Quatrième tranche de vie
Quatrième tranche de vie
Cinquième tranche de vie
Cinquième tranche de vie
Duo Eugénie-Gégène
Cinquième tranche de vie
Choeur final
Epilogue
L'orchestre est sensiblement le même que dans les deux premiers volets. Bois par un (flûte, hautbois, clarinette en si bémol, basson), deux cors et une trompette, des percussions plus nombreuses (timbales, cymbale, caisse claire, tambour de basque), harpe et cordes (Violons 1 et 2, Alto, violoncelle, contrebasse).
Le chroniqueur judiciaire :
...La Nature, la Vérité, la Vie... voilà l'impératif catégorique de l'art actuel... encore un mot, une simple question : pourquoi l'héroïne du drame lyrique est-elle toujours au moins châtelaine ? Mais pourquoi donc ? Exposez-vos raisons, je les écouterai, je suis de bonne foi, je cherche à me mettre d'accord avec les uns et les autres... Question de coutume, de coup d'œil, me direz-vous...
Bah, tout ça est dépassé. Allons donc... Soyons sincères, parlons net. Dites-moi si la pauvre petite Eugénie, la lingère d'à côté, votre voisine de mansarde à l'époque où, étudiant famélique, vous vous rongiez les poings en vous serrant la ceinture, si cette douce gamine que vous entendiez fredonner de sa voix brisée et qui passait sans vous frôler dans le corridor étroit et puant du sixième, n'a pas semé pour vous le rêve d'amour à pleines poignées ? Aviez-vous besoin, à vingt ans, pour sentir votre cœur se dilater dans votre poitrine, de vous représenter une marionnette d'Opéra exécutant des cabrioles réglées par un chef d'orchestre en habit noir et cravate blanche ?
Mais oui, soyons sincères, soyons honnêtes avec nous-mêmes, que diantre... Eugénie, c'est la poésie de tout le monde, c'est la romance du siècle de la locomotive. Voulez-vous bien me dire enfin ce que vient faire sur la scène de nos théâtres modernes, où l'on s'éclaire au gaz, une Marguerite au rouet avec son toupet de filasse, son béguin de velours et ses nattes artificielles ? Montrez-nous donc enfin la Marguerite réelle, celle du XIX° siècle et du XVIII° arrondissement, montrez-nous donc enfin la lingère à sa machine à coudre, et vous nous empoignerez jusqu'aux fibres...
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Denise Centore et Germaine Tailleferre font référence au roman réaliste (Zola, Stendhal, Maupassant, Balzac...) et à l'opéra naturaliste en France (Carmen de Georges Bizet, Louise de Gustave Charpentier) mais aussi en Italie avec le vérisme (Paillasse de Leoncavallo ) ou en Autriche avec l'Ecole de Vienne (Wozzeck d'Alban Berg).
Encore un mot. En voilà assez, je le dis tout net, en voilà assez avec vos pantins vêtus à la chienlit, s'agitant dans des décors carton-pâte, au milieu de situations de contes de fée... Balayez-moi tout ça et rangez-le au magasin des accessoires, avec la Reine Margot, les Trois Mousquetaires et la Belle Hélène... Plus de roulades, plus de sentiments faux à pleurer débités sur des grands airs à trémolos... Je ne mâche pas mon dernier mot : à bas les châteaux-forts truqués, les perruques à tire-bouchons, et tou le fatras traditionnel... et vive l'histoire vécue, la tranche de vie saignante servie toute chaude...
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Denise Centore et Germaine Tailleferre font référence au roman réaliste (Zola, Stendhal, Maupassant, Balzac...) et à l'opéra naturaliste en France (Carmen de Georges Bizet, Louise de Gustave Charpentier) mais aussi en Italie avec le vérisme (Paillasse de Leoncavallo - Manon Lescaut de Puccini) ou en Autriche avec l'Ecole de Vienne (Wozzeck d'Alban Berg). Le personnage d'Eugénie (ingénue ?), une couturière, proie d'hommes sans scrupules, fait directement référence à Louise, provinciale qui trouve un travail de couturière à Paris.
Le patron à la cantonnade : Où's qu'elle est donc la patronne ? C'te grande carne, où's qu'elle est donc ?
Titine : Alle est sortie chercher des pommes ,
Le patron : Où's qu'elle est donc la patronne ? J'crois qu'elle oublie son miroton.
Paula : C'est pas pour dire, il est sciant c't'homme.
Le patron : J'vas m'foutre en rogne c'est embêtant, ça m'abîme le tempérament
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Le premier dialogue rappelle le sprechgesang, technique utilisée par l'école de Vienne (voir Wozzeck, de Berg), différente du récitatif accompagné car plus proche du dialogue parlé. On retrouve aussi la simplicité prosaïque du texte de l'opéra de Gustave Charpentier (Louise : Le père, "Les pauvres gens")
Eugénie : Faut pas vous fâcher M'sieur Ernesse. On n'y va pas c'est qu'l'ouvrage presse, y a six jupons qu'on est après. Le miroton faudrait l'tourner. Passez donc la queillère en fer qu'est pendue à la cuisinière.
Le patron : Où veux-tu qu'je trouve la queillière, viens t'occuper d'ça, c'est pas mon affaire.
Eugénie : Je viens juste le temps de poser mon dé.
Le patron : Tu peux bien v'nir avec ton dé, pochetée.
Paula : Alla bien tort de s'laisser faire, l'patron c'est un bon à rien faire, toujours assis dans c'te cuisine, y d'vient si gros ma pauvre Titine qu'y a pus moyen de l'ôter d'là.
Titine : C'est pourtant vrai c'que tu dis là
Eugénie : Laissez moi donc
Titine et Paula : Qu'est-ce que t'as Eugénie ? Ah ! mon Dieu qu'est-ce qu'elle a ?
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Les voix : Le patron est basse, Eugénie soprano dramatique, Titine soprano (chantée par une soprano léger), Paula mezzo.
Associez les personnages et les voix...
Eugénie : Après l'instant où je me suis livrée, au souffle glorieux du printemps, au seuil de ma seizième année, et à ce Monsieur J. Duplan, depuis ce jour plein d'illusions, je suis le jouet des passions.
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Parodie de Depuis le jour extrait de Louise, de Gustave Charpentier
Titine : Eugénie dis la vérité.
Paula : Eugénie, ne nous cache rien.
Titine : C'est la vie
Paula : C'est le destin
Titine : C'est sûr, le patron l'a pincée.
Eugénie (refoulant ses larmes) : Allons, mes enfants, le travail attends...
Paula : Du coup j'ai perdu mon devant...
Titine : Tiens Paula, le v'la. J'étais assise dessus...
Entrée dramatique de la patronne, madame Phémie
Phémie : Mes compliments, l'ouvrage avance, on a beau vous dire qu'c'est pressé, qu'c'est pour une noce, ces demoiselles ça chante des romances. Mais qu'est-ce qu'elle chantera Mame Fildécosse quand elle aura pas le trousseau de sa demoiselle.
Eugénie : Mame Phémie regardez ce jupon. C'est presque fini, il manque plus que la dentelle.
Phémie : Misère ! Mais c't'horreur. C'te dégoutation j'peux pas y croire elle mange du saucisson, du saucisson à l'ail.
Madame Phémie : Du saucisson à l'ail, elle salit tout son travail ! Je vous mets dehors illico presto. Faites votre paquet, Mame Eugénie, au trot ! Je veux des filles sérieuses ici, pas de farçeuses...
Eugénie (belle indignation) : Je ne suis pas une fille sérieuse, moi !
Le Chroniqueur judiciaire (texte ajouté pour l'Opéra de Limoges)
Eugénie comparaît devant ce tribunal pour le vol d'un saucisson à l'ail!
Eugénie : Pauvre et laborieuse fille de Paris, d'un rond de saucisson, je me nourris, que je vais, la journée finie, manger sur un banc du square Morny. Par son odeur probe et sincère qui fleure bon la ménagère, il me garde des adultères qu'adonne le patchouli pervers. Nul ne me suit, nul ne m'arrête, je vais droit en levant la tête, fière d'être l'ouvrière honnête, honte au fêtard en goguette.
La juge (ajouté) : Coupable!
Phémie : Ça cause comme une vraie féministe. Ça raisonne comme une vraie anarchiste ? Je n'veux pas d'ça à l'atelier, ça mettrait l'feu à tout l'quartier
La juge (ajouté) : Silence!
Le Patron : J't'attends d'puis une heure trois quart. Ça va barder, nom d'un pétard.
Phémie : Oui mon Ernesse, oui mon trésor, c'est pas ma faute si j'suis en r'tard.
La juge (ajouté) : Silence!
Titine : Ce vieux chameau... causons d'une sauterelle, ça alors... c'est pas une femme, c'est une sangsue...
Paula : T'as raison, Titine... Mame Phémie, c'est une ménagerie à elle toute seule ; mais faut penser à Eugénie, la v'là sans place, la pauvre créature...
Eugénie : Je sais ce qui me reste à faire ...
La juge (ajouté) : Silence!
Paula : Ecoute voir, j'ai un ami qu'a une jolie situation, il est homme-tronc à la Foire du Trône, paraît que dans sa baraque on cherche une femme sans tête... Si t'allais te présenter ?
La juge (ajouté) : Silence!
Eugénie : Femme sans tête ? J'aurais pas la patience.
Titine : Ah ben, moi aussi j'ai un ami. Lui c'est pas foulant son travail. Il écrit des livres. Quand il a fini, il recopie, et quand il a fini de recopier, il déchire tout et il recommence.
Paula : C'est original.
Eugénie : J'aurais pas la patience.
Paula : Faut quand même te chercher une position...
La juge (ajouté) : J'appelle mademoiselle Titine et mademoiselle Paula à la barre
Titine - Paula
Ensemble : Et ton enfant chère tête frileuse penchée au bord du nid. Ah ! malheureuse, ne sois pas mère dénaturée
Titine : Eugénie pense au gamin
Paula : et n'oublie pas ton orphelin.
Eugénie : C'est l'enfant de M'sieur J. Duplan, un homme qui portait des gants blancs, qu'avait du linge en fin' baptiste, et qui citait les symbolistes. C'est pas qu'il était tellement beau mais il était chef de bureau. Alors j'ai cru qu'il m'épous'rait. Ces gens-là, c'est tellement parfait.
Et il m'a quittée, un beau jour, just' au coin d'la rue du four. Quand il a su qu'j'allais être mère, il m'a dit : j'suis déjà grand-père. Il était né aux colonies et on l'avait marié tout p'tit. Il m'a expliqué en pleurant qu'il n'avait pourtant qu'vingt neuf ans, le jour de la noce à sa fille qu'était une étoile de quadrille. Ah, ça, je n'lui reproche rien. J'ai été victime du destin.
Après l'instant où je me suis livrée, au souffle glorieux du printemps, au seuil de ma seizième année, et à ce Monsieur J. Duplan, depuis ce jour plein d'illusions, je suis le jouet des passions.
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Parodie de l'air Depuis le jour, extrait de Louise, de Gustave Charpentier
La Juge : Ridicule ! Coupable !
(Cris)
La Juge : Silence !
Journaliste : L'assistance proteste contre la décision de justice.
Paula : Je crois qu'y'a quelqu'un qui frappe...
Titine (voix aiguë) : Eh bien, euh... Entrez !
Gégène : Je dérange, peut-être... C'est... C'est-y ici Mame Euphémie, lingère ?
Eugénie – Paula – Titine : Mame Euphémie ? C'est ici.
Paula : Qu'est-ce que vous y voulez ?
Gégène : J'suis La Belle Jardinière...
Eugénie – Paula – Titine : Ah ?
Titine (à Paula) : C'est la Belle Jardinière
Le Chroniqueur judiciaire (ajouté) : La belle jardinière est un atelier de confection, 1, place de Clichy
Gégène : J'viens livrer le boa
Eugénie – Paula – Titine : Le boa ?
Paula : Il vient livrer le boa.
Gégène : Le boa en plumes d'autruche cyclamen pour Madame Euphémie.
Le Patron (ajouté) : Tu me fais honte !
Le Chroniqueur judiciaire (ajouté) : Pièce à conviction n° 28.
Eugénie - Titine – Paula – Gégène
Titine : Un boa ! Non, r'gardez moi ça, c'te Mame Phémie qu'à l'air d'une perche. Elle va s'coller un boa mauve.
Paula : S'mettre au cou un boa, comme une cocotte quand on vient d'mettre à la rue une fille mère. C'est la vie, c'est honteux
Gégène : Une fille mère à la rue, si c'est ça le progrès, c'est pas encore dit que je vais lui livrer son boa
Titine : même que la v'là qui veut s'détruire
Paula : tour ça pour un rond d'saucisson
Gégène : mais, où est-elle ? où est-elle ?
Eugénie : C'est moi ! C'est moi !
Titine et Paula : C'est Eugénie l'amie à M'sieur J. Duplan
Gégène : Tu t'appelles Eugénie, je m'appelle Gégène. Vois-tu c'est le destin qui près de toi m'amène. J'apportais le boa et je trouve mon Eve. Ne me repousse pas, ne détruis pas un rêve. Viens avec moi, petite, allons vers les ivresses. Allons vers le bonheur des ardentes caresses.
Eugénie : Oui, je vais avec toi, libre, forte et heureuse, quittant sans regret l'infernale exploiteuse, son boa cyclamen, son affreux miroton, les jupons de la noces, M'sieur Ernesse le patron, oublieuse à jamais du fameux M'sieur Duplan. Tu seras mon Gégène, le père de mon enfant.
Gégène : Vers les Buttes Chaumont, je vois un p'tit garni
Eugénie et Gégène : où le vin n'est pas cher et les chambres jolies. Les yeux clos j'aperçois l'accueillante banquette où, assis côte à côte, effeuillant la pâquerette, nous redirons tout bas, tendrement enlacés, les vers si émouvants de M'sieur François Coppée.
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Le duo Eugénie-Gégène, avec sa mesure ternaire (12/8), rappelle la Barcarolle des Contes d'Hoffmann de Jacques Offenbach (qui est à 6/8)
La Juge (ajouté): Coupable !
Le Chroniqueur judiciaire (ajouté) : Coup de théâtre ! Le tribunal revient sur sa décision. Eugénie est disculpée tandis que Madame Phémie est accusée de proxénétisme et d'abus de pouvoir sur la personne d'Eugénie.
Phémie : Je fais appel !
Eugénie – Paula – Titine – Gégène – Euphémie – le Patron
Tous : Au fier soleil de Messidor, qu'Eugénie est donc belle dans les bras de son Gégène. Par le printemps livrée, elle s'en va dans l'aurore de la cité nouvelle. Au souffle glorieux d'un fraternel été, c'est l'enfant de Paris à l'œil tendre et hardi.
Eugénie et Titine : Où y'a Gégène, Mesdames, il y'a l'plaisir. Où y'a Gégène, Mesdames, il y'a l'plaisir.
Les autres : Amoureux éternel, éperdument chéri, de tous les cœurs brisés qui rodent par les rues. Où y'a Gégène, Mesdames, il y'a l'plaisir
Ensemble : Où y'a Gégène, Mesdames, il y'a l'plaisir.
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L'ensemble final rassemble tous les personnages dans un chœur homophone (tout le monde dit le même texte avec le même rythme). Le texte parodie un vers de l'Idole d'Auguste Barbier :
ô Corse à cheveux plats ! Que ta France était belle,
au grand soleil de messidor !
C'était une cavale indomptable et rebelle,
sans frein d'acier ni rênes d'or ;
Le Chroniqueur judiciaire (ajouté) : Les dessous de la justice ... En 1953, les estimations les plus basses sont de 40 000 prostituées à Paris (les plus hautes parlent de 70 000), tandis que les bordels clandestins (les clandés) se multiplient (500 à Paris). Les brigades des mœurs, avec le feu vert du préfet, pratique tant bien que mal une tolérance forcée. On ferme quelques maisons pour l'exemple. Affaire classée.